Abû Uthmân Amr Ibn Bahr Ibn Mahbûb al-Kinâni al-Fuqaymî al-Basrî est plus connu sous le sobriquet de « al-Jâhiz » (l’exorbité), à cause d’une malformation de ses cornets, il avait les yeux particulièrement globuleux. Il naît à Basra dans le sud de l’Irak actuel vers 775/776 ap.-J.C., soit en 153 ou 155 de l’Hégire.

Timbre syrien commémorant Al Jâhiz, datant de 1968

Il est le petit fils d’un esclave abyssin et est issu d’un milieu très modeste. On sait très peu de chose de sa formation initiale. Ce qui est sûr, c’est qu’il apprend à lire très tôt, et qu’il compensera son manque d’instruction par une curiosité insatiable qui le pousse à lire sans restriction. Ses capacités le font remarquer par des lettrés qui vont parachever sa formation.

En 816, il quitte Basra, voyage un moment et se fixe finalement à Bagdad où il adhère au courant théologique mutazilite, auquel il est initié par un grand maître de l’École, Al Nazzâm. Le mutazilisme devient la doctrine officielle du califat abbasside sous le calife al-Ma’mûn qui règne de 813 à 833. C’est ce calife qui attire al-Jâhiz vers Bagdad, de même qu’il attire bon nombre de savants et de lettrés. Cet intérêt pour les choses de l’esprit du calife portera ses fruits avec l’épanouissement de la fameuse « maison de la sagesse », un véritable centre de recherche cosmopolite.

Prosateur de génie, lexicographe, philologue, théologien, zoologiste et poète, al-Jâhiz use d’un sens de l’observation pointu et d’un jugement critique acerbe, qui n’est pas sans rappeler, à quelques siècles d’intervalle Voltaire comme le remarqueront un certain nombre d’islamologues. Ses ouvrages les plus fameux sont Kitâb al-Hayawân (Livre des animaux), le Kitâb al-bayân wa-l tabyyn (Livre de l’exposé et de la démonstration) ou encore Kitâb al-bukhalâ (Livre des avares). Ses œuvres sont aujourd’hui encore aux programmes scolaires littéraires de beaucoup de pays arabe. En avance sur son temps dans beaucoup de questions, il sera l’un des premiers auteurs musulmans à évoquer l’évolutionnisme, ou encore à débattre, sans trancher, de l’attirance sexuelle (hétérosexuelle ou homosexuelle) sans prendre parti.

Al Jâhiz vécut des donations qu’il recevait des personnalités auxquelles il dédiait ses écrits et de la protection des califes qui partageaient ses convictions mu’tazilites (al-Ma’mûn, al-Mu’tasim et al-Wâthiq). Disgracié à la fin de sa vie, après la restauration sunnite de Mutawwakil, il meurt à l’âge respectable de 96 ans, vers 872 ap.-J.C., soit en 256 de l’hégire.

Une légende dit qu’il serait mort écrasé sous les livres de sa bibliothèque. Mais les recherches historiques semblent indiquer une mort par hémiplégie.