Que dire face à ces terribles attentats ? Comment réagir face à l’indicible et ne pas se laisser envahir par l’émotion, la haine et la peur ? 

J’ai longtemps réfléchi en me disant qu’il fallait réagir à ces attentats, dire quelque chose exprimer ce que je ressentais…mais ce sentiment est profondément indicible. D’où la grande difficulté de dire ce qui, par définition, ne peut être dit.

Le Coran comme source de réconfort et de guidance

Puis, un verset coranique que je me récite souvent, celui qui sert à introduire le prêche du vendredi dans les mosquées hanafites, a résonné dans mon esprit :

« Dieu et Ses anges se relient au prophète. Ô vous qui croyez reliez vous aussi à lui, et formulez sur lui un salut plénier. » (33:56)

Puis je me suis demandé ce que disaient les versets suivants. J’ai ouvert mon Coran et j’ai lu la suite :

« Ceux qui blessent Dieu et Son envoyé, Dieu les maudit dans ce bas monde et dans l’autre, Il leur ménage un châtiment d’ignominie. / Ceux qui blessent les croyants et les croyantes pour autre chose que leurs acquis, se chargent d’un attentat et d’un péché criant ». (33:57-58)

Le premier verset rappelle le rôle de modèle et d’exemplarité joué par le prophète Muhammad. Dieu et Ses anges « se relient » au prophète en ce sens que Dieu inspire Sa révélation au prophète Muhammad par l’entremise des anges qui vont trouver le prophète pour lui transmettre l’inspiration. C’est la raison pour laquelle il nous est demandé, à nous croyants, de nous « relier » au prophète. Le but étant que l’information circule du point de départ au point d’arrivée sans faille. Dieu est la source, Muhammad est le moyen, ou le lien, et nous, croyants, ou tous les êtres humains, sommes les destinataires.

Puis les deux versets suivants (57 et 58) stipulent que ceux qui « blessent » Dieu et Son envoyé, Dieu les maudit sur Terre comme dans l’au-delà. Mais comment des êtres humains pourraient-ils « blesser » Dieu ? Nul ne peut atteindre Dieu, ni Son ultime envoyé ; si ce n’est par la volonté et les actes de corruption du message coranique et de la mission du prophète Muhammad. Et nous en avons de parfaits exemples avec Daesh ou Jubhat al Nusra (Al Qaïda au Levant). Ceux coupables de tels actes, sont « maudits » par Dieu sur terre comme au ciel.

L’éthique islamique contre le jihadisme

Le Coran fonde l’éthique islamique sur l’ordre de faire ce qui est convenable et d’interdire ce qui est blâmable (al-amr bi l-maʿrûf wa l-nahî ʿan il-munkar). Comme par exemple :

« Les croyants et les croyantes sont en rapports mutuels de protection : ils commandent le convenable et proscrivent le blâmable. » (9:71)

Le Coran utilise le terme de maʿrûf pour évoquer le convenable. Autrement dit, le convenable, est ce qui relève de la convention, ce qui est accepté par tous. La racine a donné le terme de ʿurf, la coutume, ce qui est convenu. Cette définition est dynamique, autrement dit, elle ne consiste pas en une chose figée, une chose à faire ou à interdire, mais en quelque chose qui peut changer d’un endroit à l’autre, et d’une époque à l’autre. Or, il n’est pas nécessaire de démontrer que le meurtre d’innocents est quelque chose qui relève du blâmable, peu importe l’endroit où l’on se trouve sur Terre et indépendamment des appartenances religieuses, philosophiques, géographiques, ethniques ou politiques.

Or, les terroristes responsables des attaques de Paris, mais aussi de toutes les attaques qui visent, ont visé, ou viseront des innocents au nom de Dieu, de Son envoyé, du Coran ou de l’islam, étaient, sont et seront des êtres maudits de Dieu, parce qu’ils rejettent le « convenable », mais se font les agents de ce qui relève du blâmable :

« Qui effectue une œuvre salutaire, c’est pour soi-même ; une mauvaise, c’est contre soi-même. Ton Seigneur n’est pas injuste envers Ses serviteurs » (41:46)

Et :

« Notre Seigneur, Tu es le rassembleur des humains au jour qui ne fait pas de doutes [Jour du jugement], et Dieu ne transgresse pas Ses promesses [de récompenses ou de châtiments] » (3:9)

Enfin, un mot pour finir sur ces « puristes », ces gens qui proclament débarrasser l’islam des pratiques qui leur semblent étrangères, ces « ajusteurs », qui se pensent comme de vrais représentants de l’islam, donc en minorité contre la pratique religieuse de la majorité. Dieu nous a mis en garde contre eux, les versets sont clairs :

« Il s’en trouve parmi les gens pour dire : « Nous croyons en Dieu et au Jour dernier », sans être pour cela des croyants ; / trahissant Dieu et ceux qui croient, ils ne trahissent qu’eux-mêmes, et n’en ont pas conscience. / Il y avait une maladie dans leur cœur : Dieu les grandit en maladie, il leur revient un châtiment douloureux, à la mesure de leur mensonge ! » (2:8-10)

Et :

« Si on leur dit « Gardez-vous de faire dégât sur la terre », ils répondent : « Meilleure nous la rendons ». / Eh bien ! Ce sont eux, les faiseurs de dégât, mais ils n’en ont pas conscience. / Si on leur dit : « Croyez comme croient les Gens », ils répondent : « Nous croirions, nous, comme croient les sots ? » Eh bien ! Ce sont eux, les sots, mais ils ne le savent pas. » (2:11-13)