Voici un nouveau billet après quelques temps d’arrêt. Pour rappel, cette rubrique consiste à rédiger une petite réflexion fondée sur le verset du jour que me propose mon application de salât. Chaque jour un verset différent. Aujourd’hui, le verset provient de la sourate Hûd.

وَ أَقِمِ اَلصَّلاٰةَ طَرَفَيِ اَلنَّهٰارِ وَ زُلَفاً مِنَ اَللَّيْلِ إِنَّ اَلْحَسَنٰاتِ يُذْهِبْنَ اَلسَّيِّئٰاتِ ذٰلِكَ ذِكْرىٰ لِلذّٰاكِرِينَ

« Accomplis la prière aux deux pointes du jour, et au cours des heures de la nuit (qui leur sont proches). Les actions belles dissipent les mauvaises. Que cela soit rappel à ceux qui pratiquent le Rappel » (trad. Le Coran essai de traduction, de Jacques Berque)

Voici le verset du jour proposé par mon application de salât. Et quel verset…l’algorithme m’a proposé le verset 114, mais je n’ai pas pu résister d’y ajouter le verset qui vient immédiatement après, le 115 :

وَ اِصْبِرْ فَإِنَّ اَللّٰهَ لاٰ يُضِيعُ أَجْرَ اَلْمُحْسِنِينَ

« [Et] sois patient, Dieu ne laisse pas perdre le salaire des bel-agissants (trad. Le Coran essai de traduction, de Jacques Berque) »

La salât comme fondement de leitmotiv d’action

Ces deux versets se situent dans une séquence où la révélation commence par édifier le prophète Muhammad (s) en première intention. En effet, quelques versets plus hauts, Dieu inspire au prophète : « Agis dans la rectitude, ainsi qu’il te fut ordonné, toi et quiconque avec toi se repent. Bannissez l’impudence ! Dieu sur ce que vous faites est Clairvoyant. » (verset 112). Autrement dit, dans l’attitude recommandée par Dieu, parmi la rectitude qu’Il nous prescrit, Il nous invite à prier à deux moments charnières de la vie d’un homme : à l’orée du jour et à la pointe extrême de la nuit. On commence la journée par un bain spirituel qui nous rapproche de Lui et nous prépare à faire face à l’angoisse de la vie en société ; puis, en fin de journée, pour nous épurer, nous laver des journées riches en soucis, dilemmes et autres équations insolubles. En un mot, la vie. Mais la vie n’est pas vaine, et nos souffrances du quotidien ne sont pas des fins en soi, mais juste des étapes. C’est pourquoi Dieu nous dit qu’il faut être patient. Car Dieu est absolument juste, aucun des efforts que nous faisons n’est perdu. Nous prions au début du jour et à sa fin, plus quelques autres moments conformément au verset 78 de la sourate XVII al Isrâ (le trajet nocturne) :

أَقِمِ اَلصَّلاٰةَ لِدُلُوكِ اَلشَّمْسِ إِلىٰ غَسَقِ اَللَّيْلِ وَ قُرْآنَ اَلْفَجْرِ إِنَّ قُرْآنَ اَلْفَجْرِ كٰانَ مَشْهُوداً

« Accomplis la prière entre le déclin du soleil et l’obscurcissement de la nuit ; la psalmodie du Coran à l’aube : le Coran de l’aube a des témoins »

…et comme source cathartique

Dans ce verset, le déclin du soleil (dulûk al shamsi) commence juste après son zénith (dhuhr), englobe l’après-midi (‘asr) et va jusqu’au crépuscule. Quant à l’obscurcissement de la nuit, cela commence évidemment avec le crépuscule (maghreb) et atteint l’obscurité complète lorsque les dernières lueurs (rouge) du soleil disparaissent (ichâ). Puis le verset insiste sur l’importance particulière du Coran de l’aube (fajr), moment singulier, début de la journée et moment dans lequel débute notre activité, ce qui doit marquer la dynamique dans laquelle on souhaite inscrire cette activité.

L’aube, c’est le lever du soleil, et avec lui, le début de notre action. « Le Coran de l’aube », relève de l’intention qui va guider notre journée. Le Coran que l’on récite dans cette première prière diurne (de jour) doit guider nos intentions de la journée, agir à la fois comme base de méditations pour notre journée, et pourquoi pas, comme leitmotiv, ou base d’action pour cette même période. Du reste, les anges sont témoins de ce que nous récitons, mais aussi de ce que nous accomplissons (ou pas) en relation de notre récitation coranique.

En outre, comme le rappelle le fameux hadith rapporté par Abu Sa’id al Khudhri où le prophète Muhammad (s) comparaissait la salât à un fleuve où l’on se nettoie « à chaque fois qu’il (le croyant) fait un péché puis invoque et demande pardon, il lui est pardonné ce qu’il a fait avant elle. » La salât est cathartique (purificatrice), elle nous lave de nos péchés.

Ainsi, le verset invoqué de la sourate Hûd, insiste sur deux moments précis pour accomplir la salât car d’une part, elle nous fait commencer la journée et inscrire notre action dans un cadre dynamique. Comme une feuille de route qui nous rappellerait l’importance de la générosité, de la compassion, du savoir, ou de l’équité, selon les versets que l’on aura récités. Mais d’autre part, surtout lors de la prière nocturne, la salât nous purifie, nous lave de ce que nous aurions mal fait ou mal agis. C’est ce que veut dire la suite du verset, l’action belle est toujours supérieure à la mauvaise. Elle l’efface. Seuls ceux qui connaissent le Rappel (dhikr) de Dieu y ont recours. Charge donc aux croyants sincères de se rappeler de cela, d’inscrire leurs actions dans le cadre coranique et de ne jamais oublier la clémence et la compassion de Dieu qui nous permet de racheter une mauvaise action par une bonne.

En dernière analyse, peut-être est-il plus juste de rappeler que la salât véritable, al salât al wistâ, que l’on peut traduire par « la prière médiane » et qui a fait couler beaucoup d’encre en analyse et en interprétation.

حٰافِظُوا عَلَى اَلصَّلَوٰاتِ وَ اَلصَّلاٰةِ اَلْوُسْطىٰ وَ قُومُوا لِلّٰهِ قٰانِتِينَ

« Soyez assidus aux prières, surtout à la prière médiane. Dressez-vous vers Dieu en dévotion » (trad. Le Coran essai de traduction, de Jacques Berque)

Pour ma part, j’ai toujours considéré que toutes nos actions devaient être placées sous le regard de Dieu. La salât formelle est un moment particulier qui nous permet de matérialiser concrètement ce lien spirituel et de nous structurer. La prière médiane dont il est question ici, peut, peut-être, être comprise comme notre action, notre manière d’être, de dire et de faire pendant la journée, pendant ce temps intermédiaire entre deux salâts, à savoir celle qui ouvre la journée et celle qui l’a clôt. Alors dressons-nous en dévôtieux et dévôtieuses, non seulement dans les actes du culte, mais aussi et surtout, dans notre vie de tous les jours.

Wa Allahu a’lam…